Guerre et politique, vu à travers l’objectif de Jean Claude Coutausse

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Guerre et politique, vu à travers l’objectif de Jean Claude Coutausse

Quand on entre dans l’appartement de Jean-Claude Coutausse, on découvre un homme simple. Seule une pièce s’ouvre sur ses fascinations. Avec des poupées vaudoues accrochées d’un côté du mur et ses photographies en une de journaux encadrées de l’autre côté, on pénètre dans le monde du photo-journaliste.

Photojournaliste depuis l’obtention de son diplôme à l’L.E.P d’Orthezn , son ambition naît d’un désir de « raconter le monde en photo ». Un moyen d’expression, que le quinquagénaire exprime à travers la pellicule « Mon écriture, c’est de la photographie » dit-il.

Des événements, il en a suivi, et des expériences fortes, sa valise en est pleine. Des vaudous haïtiens aux guerres, on ne sort pas indemne de ces aventures.

La chute du mur de Berlin, les intifadas, la guerre du Golfe, ou encore les révolutions de l’Est, l’expérience la plus traumatisante restera celle de la Somalie, en 92. « J’ai marché parmi les morts pendant un mois ».
La Somalie, il l’a couverte alors que le monde avait les yeux rivés sur les J-O de Barcelone. C’est Médecin Sans Frontière qui est venu le voir pour parler de la situation de crise que traversait le pays. Frappé par la guerre et la famine.
Un mois passé dans cet état en sang. « On ne sort pas indemne de ce genre d’expérience ». A son retour, les médias ont commencé à parler de l’horreur qui envahi le pays. Puis ce fut l’affluence de journalistes et photo-reporters en Somalie. Des pages entières sur ses photos lui seront consacrées dans les journaux. « J’avais l’impression de faire mon boulot, j’avais l’impression de parler au monde. »

©Jean-Claude Coutausse / french-politics.com

©Jean-Claude Coutausse / coutausse.com

Couvrir des guerres, c’est un grand espace de liberté pour lui. Les villes ne présentent plus aucune règle. Ces conflits, « causés par les politiques », ramène l’homme à son hostilité. Pour le photographe, rien ne sert de raconter les guerres aux lecteurs « ils s’en foutent ». Les images parlent d’elles-mêmes.

On comprend mieux la philosophie de Jean Claude Coutausse quand on sait qui il considère comme « Maître de la photographie ». Raymond Depardon véridiquement. Parce qu’il « doute de tout ». C’est, selon lui, un parfait photographe européen avec un point de vue européen sur le monde. « Un citoyen du vieux continent », ajoutera-t-il.

Il me raconte que le photographe Raymond Depardon, créateur de l’agence Gamma, a un jour fait un grand panoramique de sa chambre d’hôtel en Afrique, pendant qu’au Rwanda, des gens se tapaient dessus. Pour lui, « il a montré que l’où que l’on soit, c’est le bon endroit, parce que l’on raconte notre propre histoire. »
Il cite aussi parmi les professionnels du photo-journaliste, James Nachtwey. Le photographe de guerre américain qui a « un regard d’américain » parce qu’il « donne envie d’envahir l’Irak avec ses photographies, ouvertes très frontales. » On voit des gens qui souffrent au combat, qui « crèvent la bouche ouverte. »

« Un gros meeting c’est l’équivalent à ce que font les prêtres vaudous. »

Un moment très marquant de sa carrière est Haïti. « J’ai dû y allez 35 fois en tout là-bas »
Un attachement fort. Un pays à part, construit par d’anciens esclaves avec un système politique compliqué, des séismes et une pauvreté extrême.

©Jean-Claude Coutausse / coutausse.com

©Jean-Claude Coutausse / coutausse.com

C’est entre autres une relation forte au paganisme qui relie l’homme à ce pays.
Suivre le culte vaudou durant trois ans se révèlent être pour lui une expérience qui apprend beaucoup sur soi même et sur le monde, tout comme sur le pouvoir qu’ont les prêtres vaudous et leur emprise sur la population.

Jean Claude Coutausse met en relation le culte vaudou et les politiques.
« Un gros meeting c’est l’équivalent de l’emprise que j’ai vu des prêtres vaudous sur la population Haïtienne ».

Contacté par Le Monde pour travailler en tant que photojournaliste politique en 2005, il relève le défi d’imposer à une rédaction entièrement littéraire, un rapport à la photographie.
C’est alors qu’il commence à devenir l’un des piliers de la photographie politique en France.

©Jean-Claude Coutausse / french-politics.com

Pour le photojournaliste, lors des meetings, les politiques font appel à l’imaginaire pour captiver la foule. Comme faire appel à la mémoire des hommes qui ont marqué le pays.
Fillon ou Marine Le Pen qui appellent à la mémoire de l’ancien chef d’état de 1959 à 1969, le Général De Gaulle . « Tout ça c’est religieux, c’est abstrait. »

Il explique que les gens sont presque en transe durant les meetings.« Macron fait des discours très longs avec un vide sidérale puisqu’il ne peut pas parler du programme, qu’il n’a pas encore dévoilé. Ce ne sont que des incantations et les gens sont sous le charme », ajoute-t-il en citant l’une des phrases du fondateur du mouvement En Marche dite durant l’un de ses meetings « La route est devant nous… ».
C’est de cette manière que le photographe voit la politique et c’est ce qui l’intéresse.

©Jean-Claude Coutausse / french-politics pour Le Monde

Jean Claude Coutausse a pris l’image, devenue célèbre, de la victoire à la primaire socialiste de Benoît Hamon.
Ils étaient deux photographes à son QG, dans la tour Montparnasse, alors que d’autres photojournalistes s’étaient rendus chez Valls ou Peillon.
Ce choix, le photographe ne l’a pas fait involontairement. « J’avais vu lors de ses meetings qu’il soulevait le plus les foules, il avait faim de politique ». Il arrive de par son expérience à sentir ceux qui en ont réellement envie et ceux qui n’en veulent pas, parce que les politiques, il les connaît bien : « J’ai commencé à les côtoyer dans les années 80 quand j’étais à Libé » où il y est resté huit ans.

Ce qui plaît dans ses photographies, c’est le regard qu’il apporte. Sa vision, qui s’alimente de sa culture, son humeur du jour et d’autres éléments encore. Mais il avoue que la profession de photojournaliste meurt. « Toujours plus de jeunes photographes pour moins de place ».

Liens pour découvrir son travail :
Site
Bain de foule

©Jean-Claude Coutausse / french-politics.com

©Jean-Claude Coutausse / french-politics.com

©Jean-Claude Coutausse / french-politics.com

©Jean-Claude Coutausse / french-politics.com

©Jean-Claude Coutausse / french-politics.com

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